Page:Œuvres complètes de Frédéric Bastiat, Guillaumin, 6.djvu/496

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coûtera-t-il à mon vendeur pour me le rendre  ? nais encore : Combien m’en coûtera-t-il pour me le rendre à moi-même  ?

Ces questions personnelles et les réponses qu’elles provoquent font tellement partie essentielle de l’évaluation, que le plus souvent elles la déterminent.

Marchandez un diamant trouvé par hasard. On vous cédera fort peu ou point de travail ; on vous en demandera beaucoup. Pourquoi donc donnerez-vous votre consentement  ? parce que vous prendrez en considération le travail qu’on vous épargne, celui que vous seriez obligé de subir pour satisfaire, par toute autre voie, le désir de posséder un diamant.

Quand donc le travail antérieur et le travail actuel s’échangent, ce n’est nullement sur le pied de leur intensité ou de leur durée, mais sur celui de leur valeur, c’est-à-dire du service qu’ils se rendent, de l’utilité dont ils sont l’un pour l’autre. Le capital viendrait dire : « Voici un produit qui m’a coûté autrefois dix heures de travail ; » si le travail actuel était en mesure de répondre : « Je puis faire le même produit en cinq heures ; » force serait au capital de subir cette différence : car, encore une fois, peu importe à l’acquéreur actuel de savoir ce que le produit a demandé jadis de labeur ; ce qui l’intéresse, c’est de connaître ce qu’il lui en épargne aujourd’hui, le service qu’il en attend.

Le capitaliste, au sens très général, est l’homme qui, ayant prévu que tel service serait demandé, l’a préparé d’avance et en a incorporé la mobile valeur dans un produit.

Quand le travail a été ainsi exécuté par anticipation, en vue d’une rémunération future, rien ne nous dit qu’à n’importe quel jour de l’avenir il rendra exactement le même service, épargnera la même peine, et conservera par conséquent une valeur uniforme. C’est même hors de toute