Page:Œuvres complètes de Frédéric Bastiat, Guillaumin, 6.djvu/522

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en ces termes, il est véritablement superflu de la résoudre avec exactitude. — Dans l’espèce humaine, comme dans tous les êtres organisés, cette puissance surpasse, dans une proportion énorme, tous les phénomènes de rapide multiplication que l’on a observés dans le passé, ou qui pourront se montrer dans l’avenir. — Pour le froment, en admettant cinq tiges par semence et vingt grains par tige, un grain a la puissance virtuelle d’en produire dix milliards en cinq années.

Pour l’espèce canine, en raisonnant sur ces deux bases, quatre produits par portée et six ans de fécondité, on trouvera qu’un couple peut donner naissance en douze ans à huit millions d’individus.

— Dans l’espèce humaine, en fixant la puberté à seize ans et la cessation de la fécondité à trente ans, chaque couple pourrait donner naissance à huit enfants. C’est beaucoup que de réduire ce nombre de moitié, à raison de la mortalité prématurée, puisque nous raisonnons dans l’hypothèse de tous les besoins satisfaits, ce qui restreint beaucoup l’empire de la mort. Toutefois ces prémisses nous donnent par période de vingt-quatre ans :

2 — 4 — 8 — 16 — 32 — 64 — 128 — 256 — 512, etc. ; enfin deux millions en deux siècles.

Si l’on calcule selon les bases adoptées par Euler, la période de doublement sera de douze ans et demi ; huit périodes feront justement un siècle, et l’accroissement dans cet espace de temps sera comme 512  : 2.

À aucune époque, dans aucun pays, on n’a vu le nombre des hommes s’accroître avec cette effrayante rapidité. Selon la Genèse, les Hébreux entrèrent en Égypte, au nombre de soixante et dix couples ; on voit dans le livre des Nombres que le dénombrement fait par Moïse, deux siècles après, constate la présence de six cent mille hommes au-dessus de vingt et un ans, ce qui suppose une population