Page:Œuvres complètes de Frédéric Bastiat, Guillaumin, 6.djvu/594

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reuses pour l’humanité, peut-être même que je l’élevais dans mon estime au-dessus du principe sympathique, du dévouement, de l’abnégation. — Non, je ne l’ai pas jugé ; j’ai seulement constaté son existence et son omnipotence. Cette omnipotence, je l’aurais mal appréciée, et je serais en contradiction avec moi-même, quand je signale l’intérêt personnel comme le moteur universel de l’humanité, si je n’en faisais maintenant découler les causes perturbatrices, comme précédemment j’en ai fait sortir les lois harmoniques de l’ordre social.

L’homme, avons-nous dit, veut invinciblement se conserver, améliorer sa condition, saisir le bonheur tel qu’il le conçoit, ou du moins en approcher. Par la même raison, il fuit la peine, la douleur.

Or le travail, cette action qu’il faut que l’homme exerce sur la nature pour réaliser la production, est une peine, une fatigue. Par ce motif, l’homme y répugne et ne s’y soumet que lorsqu’il s’agit pour lui d’éviter un mal plus grand encore.

Philosophiquement, il y en a qui disent : Le travail est un bien. Ils ont raison, en tenant compte de ses résultats. C’est un bien relatif, en d’autres termes, c’est un mal qui nous épargne de plus grands maux. Et c’est justement pourquoi les hommes ont une si grande tendance à éviter le travail, quand ils croient pouvoir, sans y recourir, en recueillir les résultats.

D’autres disent que le travail est un bien en lui-même ; qu’indépendamment de ses résultats producteurs, il moralise l’homme, le renforce, et est pour lui une source d’allégresse et de santé. Tout cela est très-vrai, et révèle une fois de plus la merveilleuse fécondité d’intentions finales que Dieu a répandues dans toutes les parties de son œuvre. Oui, même abstraction faite de ses résultats comme production, le travail promet à l’homme, pour récompenses supplémen-