Page:Œuvres complètes de Platon (Chambry), tome 1.djvu/352

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Charmide rougit et n’en parut d’abord que plus beau ; car la modestie convenait à son âge ; puis il me fit une réponse qui ne manquait pas de noblesse. Il me dit qu’il n’était pas facile, dans le cas où il se trouvait, ni de dire oui, ni de dire non. [158d]

« Si, en effet, dit-il, je dis que je ne suis pas sage, outre qu’il n’est pas naturel de porter un tel témoignage contre soi-même, je donnerai un démenti à Critias et à beaucoup d’autres, aux yeux desquels je passe pour sage, à ce qu’il dit. D’un autre côté, si je dis oui et me loue moi-même, peut-être cela paraîtra-t-il choquant, de sorte que je ne sais comment te répondre. »

Alors moi, je lui dis : « M’est avis, Charmide, que tu as répondu comme il fallait, et je crois, ajoutai-je, que nous devons rechercher ensemble si tu as ou si tu n’as [158e] pas ce que je demande. De cette façon, tu ne seras pas forcé de dire ce que tu ne veux pas dire, et moi, de mon côté, je n’entreprendrai pas ma cure sans examen préalable. Si cela te plaît, je suis prêt à faire cette enquête avec toi, sinon je te laisse tranquille.

— Cela me plaît plus que tout au monde, dit-il, et s’il ne tient qu’à cela, mène l’enquête suivant la méthode qui te paraîtra à toi-même la meilleure.

VII. — Eh bien, repris-je, voici celle qui me semble être la meilleure pour cette enquête. Il est clair que, si tu possèdes la sagesse, [159a] tu es à même de t’en former une opinion. Résidant en toi, si en effet elle y réside, elle doit forcément y faire naître quelque sentiment, d’après lequel tu peux te faire une idée de ce qu’elle est et de son véritable caractère. Ne le penses-tu pas ?

— Je le pense, dit-il.

— Eh bien, repris-je, ce que tu penses, tu peux, puisque tu sais parler grec, nous l’exprimer comme ton esprit le conçoit.

— Peut-être, dit-il.

— Afin donc que nous puissions juger si elle est en toi ou non, dis-nous, repris-je, ce qu’est la sagesse, à ton opinion. »