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BIOGRAPHIES

l’esprit de M. Pascal, et s’estoit attaché à luy[1]. M. Pascal ayant donc quitté le monde, et ayant resolu de ne plus s’occuper que des choses de Dieu, il fit comprendre à M. de Roannez l’importance d’en faire de mesme, et luy parla là dessus avec tant de force qu’il le persuada si bien et si fortement que M. de Roannez gousta tout aussy vivement tout ce qu’il luy dit sur ce sujet, comme il avoit gousté ses raisonnements pour les choses de science, qui faisoient auparavant leur plaisir et le sujet de toutes leurs conversations. Estant donc ainsy touché de Dieu par le ministere de M. Pascal, il commença à faire des reflexions sur le neant du monde, il prit un peu de temps pour penser à ce que Dieu demandoit de luy ; enfin il prit la resolution de ne plus jamais songer au monde, de s’en retirer aussy tost qu’il pourroit, et de rendre le gouvernement de Poitou qu’il avoit des qu’il pourroit en avoir l’agrément du roy. Huit jours aprez qu’il eut pris sa resolution là dessus, et qu’il en eut conféré avec mon oncle qu’il avoit mesme pris chez luy pour quelque temps pour l’ayder à se déterminer, il arriva que M. le comte d’Harcourt, son grand oncle[2], luy vint dire un jour qu’on luy avoit proposé un mariage pour luy, qui estoit Mademoiselle de [Mesmes][3],

  1. Vide infra, t. III, p. 107 sqq.
  2. Le comte d’Harcourt, né en 1601, mort en 1666, gouverneur d’Anjou, était le second fils de Charles de Lorraine, duc d’Elbeuf. Voir son Historiette dans Tallemant des Reaux, 254, Ed. Monmerqué, Paris, t. V, 1856, p. 9. Jusqu’en juillet 1662, il fut le partisan dévoué, le recors, comme disaient les Frondeurs, du cardinal Mazarin. C’est lui qui commandait les troupes royales envoyées dans le Poitou pour combattre Condé et la Rochefoucauld, à la fin de 1651, au moment où le duc de Roannez prit possession de son gouvernement (Chéruel, Histoire de France sous le ministère de Mazarin, 1882, t. I, p. 16 et 42 sqq.).
  3. Nous rectifions l’orthographe des Copies, qui donnent Menus.