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PRÉFACE SUR LE TRAITÉ DU VIDE[1]


Le respect que l’on porte à l’antiquité estant aujourd’huy à tel point, dans les matieres où il doit avoir moins de force, que l’on se fait des oracles[2] de toutes ses pensées, et des mysteres[3] mesme de ses obscurités ; que l’on ne peut plus advancer de nouveautés sans peril, et que le texte d’un autheur suffit pour destruire les plus fortes raisons[4]

Ce n’est pas que mon intention soit de corriger un vice par un autre, et de ne faire nulle estime des

  1. Faugère, dont nous suivons la collation, a relevé à la fin de ce morceau la note suivante du P. Guerrier : « J’ai transcrit ceci sur une copie très imparfaite et pleine de lacunes. » Le fragment avait été publié d’abord par Bossut, qui en avait fait le premier article de la première partie des Pensées ; il avait intitulé cet article : De l’autorité en matière de Philosophie (Œuvres, 1779, t. II, p. 1–12). — Nous n’avons aucun indice objectif sur la date de ce fragment : le contenu paraît indiquer clairement qu’il se rattache aux préoccupations de Pascal pendant l’année 1647, aux résistances qu’il a rencontrées à Rouen et à Paris, à la lecture de Guiffart, aux suggestions de Roberval, comme aussi à la méditation de Jansénius ; il serait contemporain de la controverse avec le P. Noël.
  2. Voir la note de la p. 141. — Le mot oracle s’employait au xviie siècle dans un sens plus étendu que de nos jours. Littré cite plusieurs textes de Bossuet et de Bourdaloue où oracle signifie révélation de la foi chrétienne : « C’est un oracle de l’apôtre et par conséquent un oracle de la vie éternelle, que la sagesse de ce monde est ennemie de Dieu. »
  3. Le mystère donne à l’obscurité un caractère profond et sacré qui oblige à y chercher une vérité. Cf. le texte de Massillon cité par Littré : « Tout est mystère dans la conduite du Sauveur. »
  4. « Il y a ici une lacune d’environ dix lignes ». Note du P. Guerrier, d’après Faugère.