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DISCOURS SUR LES PASSIONS DE L'AMOUR

Ne serait-elle point la personne à laquelle le Discours fait allusion, dans un passage tel que celui-ci : « Quand on aime sans égalité de condition...? » Inévitablement la conjecture devait séduire quelque historien de Pascal[1]. Mais, en l'absence de toute confirmation positive, elle demeure purement gratuite ; M. Gazier en a fait justice dans l'étude que nous avons eu déjà l'occasion de citer : Pascal et Mlle de Roannez. Les prétendues amours de Pascal[2]. Nous ajouterons, pour notre part, que le procédé était un peu puéril, de disposer ainsi du nom de Mlle de Roannez, simplement parce que le sort, qui préside à la conservation des documents historiques, ne nous en fournit point d'autre. Et même, à en juger par les extraits qui nous sont parvenus des lettres que Pascal écrivait, en 1656[3], il semble que la puérilité s'accompagne de quelque inconvenance morale.

Si donc Pascal a traversé une crise de passion, c'est le texte du Discours qui nous en fournira la preuve, en transmettant l'écho, en révélant le « signe » de l'amour. De là l'intérêt que les commentateurs et les historiens de Pascal ont attaché à l'examen du Discours sur les Passions de l'Amour; de là les controverses auxquelles le Discours a donné lieu. Il y a une dizaine d'années, j'avais résumé en ces termes ce qui me parais- sait devoir être retenu des diverses thèses en présence : « D'ailleurs ce Discours est loin de prouver que Pascal ait été véritablement amoureux ; quelques expressions témoignent de sentiments trop finement décrits pour ne pas avoir été éprouvés, mais il ne s'y agit que des commencements de l'amour, d'un attachement idéal. Tout le reste est une dissertation

  1. Voir l'Introduction de Faugère à l'édition des Pensées de 1844, t. 1, p. LXV, suiv., et le Discours sur les Passions de l'Amour de Pascal précédé d'une étude sur Pascal et Mlle de Roannez, par M. de Lescure, 1681.
  2. 2. Mélanges de Littérature et d'Histoire, 1904, p. 29.
  3. 3. Voir la remarquable édition des lettres à Mlle de Roannez, donnée par M. Ch. Adam dans la Revue bourguignonne de l'Enseignement supérieur, t. I, n°3, 1891.