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ŒUVRES

masse de l’Air, et c’est la derniere de ces choses qui cause la resistance qu’on y sent, et la premiere y est fort indifferente ; aussi cette resistance augmente et diminuë à proportion de la charge de l’Air, comme je l’ay fait voir.

Il faut entendre la mesme chose de la resistance qu’on sent à separer tous les corps entre lesquels il y auroit du vuide ; car l’Air ne peut pas s’y insinuer, autrement il n’y auroit pas de vuide. Et ainsi on ne pourroit les separer, sans faire hausser et soûtenir toute la masse de l’Air, et c’est ce qui cause cette resistance.

Voilà la veritable cause de l’union des corps entre lesquels il y auroit du vuide, qu’on a demeuré si long-temps à connoître, parce qu’on a demeuré si long-temps dans de fausses opinions, dont on n’est sorti que par degrez ; de sorte qu’il y a eu trois divers temps où l’on a eu de differents sentiments.

Il y avoit trois erreurs dans le monde, qui empeschoient absolument la connoissance de cette cause de l’union des corps.

La premiere est, qu’on a crû presque de tout temps que l’Air est leger[1], parce que les anciens Au-

  1. « Aristote, dit M. Duhem, pensait que l’air était pesant ; à l’appui de cette opinion, il citait (Aristote : De Cœlo, livre IV, ch. iv) [311 b. 9] une observation étrange, sans dire, d’ailleurs, s’il l’avait faite lui-même ou s’il la tenait de quelque autre philosophe : Une outre pèse davantage lorsqu’elle est gonflée d’air que lorsqu’elle est vide.