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CONCLUSION DES TRAITÉS

teurs l’ont dit ; et que ceux qui font profession de les croire les suivoient aveuglement, et seroient demeurez eternellement dans cette pensée, si des personnes plus habiles ne les en avoient retirez par la force des experiences : De sorte qu’il n’estoit pas possible de penser que la pesanteur de l’Air fut la cause de cette union, quand on pensoit que l’Air n’a point de pesanteur.

La seconde est, qu’on s’est imaginé que les Elemens ne pesent point dans eux-mesmes[1] sans autre raison sinon qu’on ne sent point le poids de l’eau quand on est dedans, et qu’un seau plein d’eau qui y est enfoncé n’est point difficile à lever tant qu’il y est, et qu’on ne commence à sentir son poids que quand il en sort : comme si ces effets ne pouvoient pas venir d’une autre cause, ou plûtost comme si celle-là n’estoit pas hors d’apparence, n’y ayant point de raison de croire que l’eau qu’on puise dans un seau

    « En ses commentaires au De Cœlo du Stagirite, Simplicius nous apprend qu’il avait reproduit cette expérience et que, contrairement au dire d’Aristote, il avait trouvé même poids à l’outre gonflée et à l’outre dégonflée ; il suppose que le résultat contraire rapporté par le Philosophe s’explique par une cause d’erreur : le souffle qui a gonflé l’outre y a introduit de l’humidité, qui en a accru le poids.

    « Les observations contradictoires d’Aristote et de Simplicius ont provoqué, dans les écoles du Moyen Âge, bien des discussions ; elles se rattachaient, en effet, à ce problème essentiel, l’un de ceux qui furent le plus vivement débattus parmi les mécaniciens d’Alexandrie aussi bien que parmi les physiciens de la Scolastique : Un élément pèse-t-il ou non lorsqu’il se trouve en son lieu naturel ? » (Revue générale des Sciences, 15 sept. 1906, p. 769).

  1. Jean Rey, qui avait pourtant démontré (Essai II) qu’il n’y a rien de leger en la nature, donne à son Essai VIII ce titre : Nul element pese dans soy-mesme, et pourquoy.