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8 ŒUVRES

récit de Marguerite Perier serait en contradiction avec ce que dit Jacqueline Pascal dans une lettre écrite le jour même. Cependant les deux versions sont loin d’être inconciliables. Jacqueline dit à sa sœur qu’elle avait, avant ce temps, entretenu Singlin des intentions de son frère. Marguerite Perier affirme seulement que la sœur de Pascal n’avait pu s’entretenir, ce jour-là, avec le prédicateur, et par suite qu’elle n’avait pu le diriger dans le choix de son sermon, ni lui faire connaître « l’état et la disposition » précis où se trouvait Pascal, dont la présence même à Port-Royal pouvait être ignorée de Singlin.

Une difficulté subsiste néanmoins. Plusieurs lettres de la Mère Angélique du mois d’octobre insistent sur l’état de maladie de Singlin. Une autre, du 18 décembre, à la reine de Pologne nous apprend qu’il était dans l’impossibilité de parler. Le 14 novembre, Singlin écrit à la Mère Angélique qu’il pourra entendre une religieuse en confession : « cela me travaille peu quand j’ay plus à écouter qu’à parler ». En janvier, l’état du malade empire, et, le 5 février, la Mère Angélique écrit encore : « Les bons Pères font courir le bruit que M. Singlin fait le malade à cause qu’on luy a défendu de prêcher, ce qui est aussi faux l’un que l’autre ». Mais nous n’avons trouvé aucune indication sur ce point dans les lettres de la première quinzaine de décembre, sauf cette phrase un peu ambiguë d’une lettre écrite au début du mois : « Mr S. m’a dit, écrit la Mère Angélique à une religieuse, qu’il ne vous avoit pu voir, mais que son sermon valoit mieux qu’un entretien particulier ». Dans ces conditions, il serait sans doute un peu téméraire de tenir pour suspect le récit, si précis dans ses détails, de Marguerite Perier, et de supposer qu’elle ait imaginé de toutes pièces l’anecdote, en lisant les Instructions Chrestiennes,

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pensées analogues dont nous avons donné ailleurs un extrait, (cf. supra, T. I, p. 131 et la note). L’auteur de la Vie de Singlin, publiée en 1736, dit que Singlin se bornait à choisir le sujet de son instruction; Arnauld et Le Maître de Sacy la rédigeaient ; puis Singlin apprenait par cœur le sermon ainsi préparé.