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262 ŒUVRES

vaut plus rien à l’égard des pecheurs, vous voudriez entrer en composition, et le faire au moins subsister pour les justes. Mais cela estant, j’en voy l’usage bien racourcy, car il ne servira plus à gueres de gens. Et ce n’est quasi pas la peine de vous le disputer.

Mais mon second qui avoit, à ce que je croy, estudié toute cette question le matin mesme, tant il estoit prest sur tout, luy respondit. Voilà mon Pere le dernier retranchement où se retirent ceux de vostre party qui ont voulu entrer en dispute : Mais vous y estes aussi peu en assurance. L’exemple des Justes ne vous est pas plus favorable 1 . Qui doute qu’ils ne tombent souvent dans des pechez de surprise sans qu’ils s’en apperçoivent? N’apprenons-nous pas des Saints mesmes combien la concupiscence leur tend des pieges secrets, et combien il arrive ordinairement, que quelques sobres qu’ils soient, ils donnent à la volupté ce qu’ils pensent donner à la seule necessité, comme S. Augustin le dit de soy-mesme dans ses Confessions?

Combien est-il ordinaire de voir les plus zelez s’emporter dans la dispute à des mouvemens d’aigreur pour leur propre interest, sans que leur conscience leur rende sur l’heure d’autre tesmoignage, sinon qu’ils agissent de la sorte pour le seul interest de la verité, et sans qu’ils s’en apperçoivent quelquefois que long-temps apres.

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1. Cf. pour toute cette discussion, l’ Apologie pour les Saints Pères, supra p. 240 sq. et la citation de saint Augustin, supra p. 242, n. I.