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LETTRE DE JACQUELINE PASCAL

mardy à se mettre en continuelle oraison : Elle n’en sortoit que pour le repas, et s’y remettoit aussi tost, et passoit ainsi jusqu’à neuf heures du soir que la Sr Candide la faisoit coucher, mais quand elle estoit couchée, elle se levoit aussi tost que la Sr Candide estoit partie et passoit une partie de la nuit en prieres.

« Le lendemain Mlle Tardieu vint à P. R. et dit à feu ma Sr Madelaine des Anges [de Dury] que Mr de la Poterie[1] avoit une Ste Épine qu’il avoit fait voir à toutes les Communautez du faux bourg et que si elle vouloit elle l’apporteroit le lendemain à P. R. Ma Sr Madelaine des Anges fut trouver la Mere à la tribune, et luy dit ce que Mlle Tardieu luy avoit dit. La Mere luy ordonna de remercier Mr de la Poterie et Mlle Tardieu, disant que nous n’estions pas dans un temps de nous divertir à voir une Ste Relique, qu’il ne falloit songer qu’à prier, et à gemir devant Dieu. Ma Sr Madelaine des Anges un peu mortifiée ne répliqua point, mais le fut dire à la Mere Agnes qui luy dit que puisque nostre Mere ne le trouvoit pas à propos, il ne le falloit pas : qu’il estoit vray que nous n’estions pas en estat de nous dissiper. Sur cela ma Sr Madelaine luy repondit, Mais ma Mere si on l’apportoit pour l’exposer Vendredi à la priere de la Passion, cela ne distrairoit pas. La Mere Agnes trouva la proposition bonne et luy dit de l’aller faire à nostre Mere. Elle fut donc à la Tribune dire sa pensée à la Mere qui l’approuva, et luy dit neanmoins qu’il ne falloit donc la passer qu’à l’heure de la priere, afin que personne ne s’y amusât, et la repasser aussi tost à Mlle Tardieu. Ma Sr Madelaine des Anges bien aise

  1. « M. de la Potherie etoit frere de Mr de la Potherie, Conseiller d’Etat ; il demeuroit au faux bourg St Jacques ; il avoit une grande quantité de reliques. Il prêta comme par hasard la Ste Epine à P. R. mais c’etoit par une providence de Dieu ; car ce fut par cette occasion que se fit le premier miracle, et ensuite l’ayant sceu il la donna à P. R. et dit que Dieu avoit fait connoitre par là en quel lieu il vouloit qu’elle fust honnorée » (Marguerite Perier, Additions au Nécrologe p. xxx).