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INTRODUCTION XLVII

Port-Royal, que leur crédit dans l’Église et dans l’État ne vise à « retrancher » , au moyen d’une déclaration formelle d’hérésie, tous ceux qui ont de la vie chrétienne la même conception que Jansénius et Saint-Cyran et qui s’y attachent comme à la pure doctrine de saint Paul et de saint Augustin ? Pascal fait front à un ennemi qui de lui- même s’était désigné.

En fait d’ailleurs, le Père Escobar avait pris le soin de condenser la substance de la casuistique enseignée par les Jésuites dans un manuel où il avait tenu à effacer son jugement propre, afin de mieux rendre manifeste l’unité de leur inspiration collective 1 . Pascal ne fera que ramener ces décisions dispersées à leur principe ; il dégagera les lois de la perversion intellectuelle qui substitue la lettre à l’esprit, qui finit par conférer aux mots — comme le disait déjà Descartes des définitions de l’École — une vertu occulte et magique 2 .

Si, dans la formule de la règle suivant laquelle le confesseur juge le pénitent, le mot a une valeur en tant que mot, on pourra se donner l’apparence de respecter la règle où ce mot est prononcé, tout en violant le principe moral dont cette règle tirait sa valeur. De même, si l’on ne doit apprécier l’intention qui fait la qualité de l’acte que par l’expression qui la manifeste au dehors, ne suffit-il pas d’une

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1. Nous empruntons à M. Karl Weiss (op. cit., p. 29) un texte de la Grande théologie morale, où Escobar met bien en relief le caractère de son Manuel : « Ego autem qui in summula mea Latina ex aliorum mente, non proprio ex Marte consequenter asserui, posse aliquem quatuor Missæ partes simul audire (quod nonnullis Societatis æmulis lapidem offensionis aliquando exhibuit) meam jam sententiam expono. »

2. Huitième Provinciale, infra T. V, p. 253 ; cf. T. IX, p. 253, note.