Page:Œuvres de Blaise Pascal, IV.djvu/69

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Selon Pascal , enfin, la condamnation des excès dont les Jésuites se sont rendus coupables serait stérile si elle ne s’accompagnait d’un réveil de la vie chrétienne 1. Il est vrai qu’il y a des cas douteux, et c’est commettre un de ces abus de mots contre lesquels sont dirigées les Provinciales, que d’attribuer à Pascal la condamnation de toute casuistique. Seulement Pascal veut que la casuistique soit, comme elle était chez les premiers Pères de l’Église, comme elle était chez les Stoïciens eux-mêmes, une invitation à ne pas se laisser leurrer par la sophistique des passions, un rappel à la pureté de la règle. Si l’intention doit entrer en ligne de compte, c’est à la condition que le fidèle se mette loyalement en face de sa conscience véritable. Au lieu de chercher dans telle ou telle circonstance une excuse dont des païens comme Aristote auraient eu honte de tenir compte, il faut qu’il dépasse l’apparence des faits pour scruter les profondeurs de l’âme où réside, chez les justes eux-mêmes, la racine des « péchés de surprise » et pour y déjouer « les pièges secrets » de la concupiscence 2 . Le savant qui a spéculé sur le hasard, le penseur qui a donné une importance décisive à la « Règle des Partis » n’ignore pas le rôle de la probabilité dans les

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indifférents qu’on veut gagner » (Mémoires, édition citée, T. II, p. 358). Cf. Sainte-Beuve, Port-Royal, 5e édition, 1888, T. II, p. 70.

1. Voir l’étude très documentée de M. Antoine Degert : Réaction des Provinciales sur la Théologie morale en France: « Non seulement elles y entraîneront l’abandon de la casuistique en vigueur, mais elles y provoqueront l’apparition de tout un nouveau système de théologie morale dont l’autorité s’imposera à peu près exclusivement pendant deux siècles à tout le clergé français et inspirera sa conduite dans la direction des âmes et l’organisation de la vie religieuse des peuples confiés à ses soins. » Bulletin de Littérature Ecclésiastique, publié par l’Institut catholique de Toulouse, novembre 1913, p. 401.

2. Quatrième Provinciale, infra p. 262.