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DE L'ESPRIT GÉOMÉTRIQUE 253

admirable science ne s'attachant qu'aux choses les plus simples, cette mesme qualité qui les rend dignes d'estre ses objets les rend incapables d'estre définies; de sorte que le manque de définition est plustost une perfection qu'un défaut, parce qu'il ne vient pas de leur obscurité, mais au contraire de leur extrême évidence, qui est telle qu'encore qu'elle n'ait pas la conviction des démonstrations, elle en a toute la cer- titude. Elle suppose donc que l'on sçait quelle est la chose qu'on entend par ces mots : mouvement, nom- bre, espace-, et, sans s'arrester à les définir inutile- ment, elle en pénètre la nature, et en descouvre les merveilleuses proprietez.

Ces trois choses, qui comprennent tout l'univers, selon ces paroles : Deas fecit omnia in pondère, in numéro, et mensura^ ont une liaison réciproque et nécessaire. Car on ne peut imaginer de mouvement sans quelque chose qui se meuve; et cette chose es- tant une, cette unilé est l'origine de tous les nom- bres ; et enfin le mouvement ne pouvant estre sans espace, on voit ces trois choses enfermées dans la première. Le temps mesme y est aussy compris : car le mouvement et le temps sont relatifs l'un à l'autre ; la promptitude et la lenteur, qui sont les différences des mouvemens, ayant un rapport nécessaire, avec le temps.

Ainsy il y a des proprietez communes à toutes cho- ses, dont la connoissance ouvre l'esprit aux plus

I. Sap. XI, 2 1 : Omnia in mensuro, et numéro, et pondère disposiiisti.

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