Page:Œuvres de Descartes, éd. Cousin, tome I.djvu/27

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je te rendrai grâce en mourant, et ne me repentirai point d’être né.

Je m’arrête un moment : l’ouvrage de la nature est achevé. Elle a préparé avant la naissance de Descartes tout ce qui devoit influer sur lui ; elle lui a donné les prédécesseurs dont il avoit besoin ; elle a jeté dans son sein les semences qui devoient y germer ; elle a établi entre son esprit et son âme les rapports nécessaires ; elle a fait passer sous ses yeux tous les grands spectacles et du monde physique et du monde moral ; elle a rassemblé autour de lui, ou dans lui, tous les ressorts ; elle a mis dans sa main tous les instruments : son travail est fini. Ici commence celui de Descartes. Je vais faire l’histoire de ses pensées : on verra une espèce de création ; elle embrassera tout ce qui est ; elle présentera une machine immense, mue avec peu de ressorts : on y trouvera le grand caractère de la simplicité, l’enchaînement de toutes les parties, et souvent, comme dans la nature physique, un ordre réel caché sous un désordre apparent.

Je commence par où il a commencé lui-même. Avant de mettre la main à l’édifice, il faut jeter les fondements ; il faut creuser jusqu’à la source de la vérité ; il faut établir l’évidence, et distinguer son caractère. Nous avons vu Descartes renverser toutes les fausses opinions qui étoient dans