Page:Œuvres de Descartes, éd. Cousin, tome I.djvu/289

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fectionne peu à peu ; et je ne vois rien qui puisse empêcher qu’elle ne s’augmente ainsi de plus en plus jusques à l’infini, ni aussi pourquoi, étant ainsi accrue et perfectionnée, je ne pourrois pas acquérir par son moyen toutes les autres perfections de la nature divine, ni enfin pourquoi la puissance que j’ai pour l’acquisition de ces perfections, s’il est vrai qu’elle soit maintenant en moi, ne seroit pas suffisante pour en produire les idées. Toutefois, en y regardant un peu de près, je reconnois que cela ne peut être ; car premièrement, encore qu’il fût vrai que ma connoissance acquît tous les jours de nouveaux degrés de perfection, et qu’il y eût en ma nature beaucoup de choses en puissance qui n’y sont pas encore actuellement, toutefois tous ces avantages n’appartiennent et n’approchent en aucune sorte de l’idée que j’ai de la Divinité, dans laquelle rien ne se rencontre seulement en puissance, mais tout y est actuellement et en effet. Et même n’est-ce pas un argument infaillible et très certain d’imperfection en ma connoissance, de ce qu’elle s’accroît peu à peu et qu’elle s’augmente par degrés ? De plus, encore que ma connoissance s’augmentât de plus en plus, néanmoins je ne laisse pas de concevoir qu’elle ne sauroit être actuellement infinie, puisqu’elle n’arrivera jamais à un si haut point de perfection, qu’elle ne soit encore capable d’acquérir quelque plus grand