Page:Œuvres de Descartes, éd. Cousin, tome I.djvu/391

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cause, à savoir par une surabondance de sa propre puissance, laquelle ne peut être qu’en Dieu seul, ainsi qu’on peut aisément démontrer.

Ce qui m’est ensuite accordé par ce savant docteur, bien qu’en effet il ne reçoive aucun doute, est néanmoins ordinairement si peu considéré, et est d’une telle importance pour tirer toute la philosophie hors des ténèbres où elle semble être ensevelie, que lorsqu’il le confirme par son autorité, il m’aide beaucoup en mon dessein.

Et il demande ici[1], avec beaucoup de raison, si je connois clairement et distinctement l’infini ; car bien que j’aie tâché de prévenir cette objection, néanmoins elle se présente si facilement à un chacun, qu’il est nécessaire que j’y réponde un peu amplement. C’est pourquoi je dirai ici premièrement que l’infini, en tant qu’infini, n’est point à la vérité compris, mais que néanmoins il est entendu ; car, entendre clairement et distinctement qu’une chose est telle qu’on ne peut du tout point y rencontrer de limites, c’est clairement entendre qu’elle est infinie. Et je mets ici de la distinction entre l’indéfini et l’infini. Et il n’y a rien que je nomme proprement infini, sinon ce en quoi de toutes parts je ne rencontre point de limites, auquel sens Dieu seul est infini ; mais pour les choses où sous quelque considération seulement je ne vois point de

  1. Voyez Objections, page 361