Page:Œuvres de Descartes, éd. Cousin, tome I.djvu/57

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est en même temps le résultat de l’image tracée dans l’œil et d’une foule de jugements rapides et imperceptibles, fruits de l’expérience. Descartes, sur tous ces objets, donne des règles que personne n’avoit encore développées avant lui ; il guide la nature, et apprend à l’homme à se servir du plus noble de ses sens. Mais, dans un être aussi borné et aussi foible, tout s’altère ; cette organisation si étonnante est sujette à se déranger ; enfin, le genre humain est en droit d’accuser la nature, qui, l’ayant placé et comme suspendu entre deux infinis, celui de l’extrême grandeur et celui de l’extrême petitesse, a également borné sa vue des deux côtés, et lui dérobe les deux extrémités de la chaîne. Grâces à l’industrie humaine appliquée aux productions de la nature, à l’aide du sable dissous par le feu, on a su faire de nouveaux yeux à l’homme, prescrire de nouvelles routes à la lumière, rapprocher l’espace, et rendre visible ce qui ne l’est pas. Roger Bacon, dans un siècle barbare, prédit le premier ces effets étonnants ; Alexandre Spina découvrit les verres concaves et convexes ; Métius, artisan hollandais, forma le premier télescope ; Galilée en expliqua le mécanisme : Descartes s’empare de tous ces prodiges ; il en développe et perfectionne la théorie ; il les crée pour ainsi dire de nouveau par le calcul mathématique ; il y ajoute une infinité de vues, soit pour accélérer la réunion