Page:Œuvres de Descartes, éd. Cousin, tome I.djvu/75

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la raison ; c’est lui qui, de nos jours, a attaqué et renversé les systèmes. Son influence ne s’est point bornée à la philosophie : semblable à cette âme universelle des stoïciens, l’esprit de Descartes est partout ; on l’a appliqué aux lettres et aux arts comme aux sciences. Si dans tous les genres on va saisir les premiers principes ; si la métaphysique des arts est créée ; si on a cherché dans des idées invariables les règles du goût pour tous les pays et pour tous les siècles ; si on a secoué cette superstition qui jugeoit mal parcequ’elle admiroit trop, et donnoit des entraves au génie en resserrant trop sa sphère ; si on examine et discute toutes nos connoissances ; si l’esprit s’agite pour reculer toutes les bornes ; si on veut savoir sur tous les objets le degré de vérité qui appartient à l’homme : c’est là l’ouvrage de Descartes. L’astronome, le géomètre, le métaphysicien, le grammairien, le moraliste, l’orateur, le politique, le poëte, tous ont une portion de cet esprit qui les anime. Il a guidé également Pascal et Corneille, Locke et Bourdaloue, Newton et Montesquieu. Telle est la trace profonde et l’empreinte marquée de l’homme de génie sur l’univers. Il n’existe qu’un moment ; mais cette existence est employée tout entière à quelque grande opération, qui change la direction des choses pour plusieurs siècles.

Arrêtons-nous maintenant sur celui à qui le