Page:Œuvres de Descartes, éd. Cousin, tome IV.djvu/160

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désirs est qu’on ne distingue pas assez les choses qui dépendent entièrement de nous de celles qui n’en dépendent point. Car, pour celles qui ne dépendent que de nous, c’est-à-dire de notre libre arbitre, il suffit de savoir qu’elles sont bonnes pour ne les pouvoir désirer (437) avec trop d’ardeur, à cause que c’est suivre la vertu que de faire les choses bonnes qui dépendent de nous, et il est certain qu’on ne saurait avoir un désir trop ardent pour la vertu. Outre que ce que nous désirons en cette façon ne pouvant manquer de nous réussir, puisque c’est de nous seuls qu’il dépend, nous en recevons toujours toute la satisfaction que nous en avons attendue. Mais la faute qu’on a coutume de commettre en ceci n’est jamais qu’on désire trop, c’est seulement qu’on désire trop peu ; et le souverain remède contre cela est de se délivrer l’esprit autant qu’il se peut de toutes sortes d’autres désirs moins utiles, puis de tâcher de connaître bien clairement et de considérer avec attention la bonté de ce qui est à désirer.

Art. 145. De ceux qui ne dépendent que des autres causes, et ce que c’est que la fortune.

Pour les choses qui ne dépendent aucunement de nous, tant bonnes qu’elles puissent être, on ne les doit jamais désirer avec passion, non seulement à