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DISCOURS SIXIÈME. 63

nous voyons qu’ils sont plus éloignés ou plus proches de nous que n’est X. Puis de ce que la lumière qui vient de l’objet 10 vers notre œil est plus forte que si cet objet étoit vers V, nous le jugeons être plus proche ; et de ce que celle qui vient de l’objet 12 est plus foible que s’il étoit vers Y, nous le jugeons plus éloigné. Enfin, quand nous imaginons déjà d’ailleurs la grandeur d’un objet, ou sa situation, ou la distinction de sa figure et de ses couleurs, ou seulement la force de la lumière qui vient de lui, cela nous peut servir non pas proprement à voir, mais à imaginer sa distance. Comme regardant de loin quelque corps que nous avons accoutumé de voir de près, nous en jugeons bien mieux l’éloignement que nous ne ferions si la grandeur nous étoit moins connue ; et regardant une montagne exposée au soleil au-delà d’une forêt couverte d’ombre, ce n’est que la situation de cette forêt qui nous la fait juger la plus proche ; et regardant sur mer deux vaisseaux dont l’un soit plus petit que l’autre, mais plus proche à proportion, en sorte qu’ils paroissent égaux, nous pourrons, par la différence de leurs figures et de leurs couleurs, et de la lumière qu’ils envoient vers nous, juger lequel sera le plus loin.

Au reste, pour la façon dont nous voyons la grandeur et la figure des objets, je n’ai pas besoin d’en rien dire de particulier, d’autant qu’elle est