Page:Œuvres de M. de Crébillon, tome second, 1750.djvu/266

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Quelle honte pour vous, indomptables romains,
De n’avoir pour appui que de ſi faibles mains !
Ô toi, qu’en ſes malheurs Rome toujours implore,
Et que ſans te nommer en ſecret elle adore ;
Toi, qui devais un jour, couronnant ſes exploits,
Soumettre à ſon pouvoir les peuples et les rois,
Daigne aujourd’hui du moins, favorable génie,
La ſauver de l’opprobre et de la tyrannie.
Caton ne revient point ; je crains que ſon ardeur
Plus loin que je ne veux n’entraîne ſon grand cœur.
Mais je le vois, c’eſt lui. Quoi ! Vous êtes en armes ?
Venez-vous redoubler, ou calmer nos alarmes ?


S C E N E   I I.
Caton, Cicéron.
C A T O N.

Je voudrais vainement, dans ce déſordre affreux,
Vous promettre, conſul, quelque ſuccès heureux :
Le deſtin du ſénat eſt d’autant plus terrible
Que la main qui nous frappe eſt encore inviſible ;
Victorieux, vaincu, j’ai combattu longtemps
Sans pouvoir reconnaître un ſeul des combattants.
Nos ſoldats étonnés, peu touchés de leur gloire,
N’ont plus ce noble orgueil garant de la victoire :