Page:Œuvres de Spinoza, trad. Saisset, 1861, tome II.djvu/515

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contraire, il est constant qu’il a vécu dans les prodigalités, dans le faste, le jeu et les courtisanes, et que ses dettes dépassent ses ressources, il sera dégradé de sa dignité et déclaré indigne de tout honneur et de tout emploi. Car celui qui ne peut se gouverner lui-même et conduire ses affaires privées est incapable, à plus forte raison, de diriger les affaires publiques.

48. Ceux qui sont obligés par la loi de prêter serment seront plus en garde contre le parjure si on leur prescrit de jurer par le salut de la patrie, la liberté et le conseil suprême, que s’ils juraient par Dieu. En effet, jurer par Dieu, c’est engager son salut, c’est-à-dire un bien particulier dont chacun est juge ; mais jurer par la liberté et le salut de la patrie, c’est engager le bien de tous, dont nul particulier n’est juge ; et par conséquent se parjurer, c’est se déclarer ennemi de la patrie.

49. Les académies, fondées aux frais de l’État, ont généralement pour but moins de cultiver les intelligences que de les comprimer. Au contraire, dans un État libre, les sciences et les arts seront parfaitement cultivés ; car on y permettra à tout citoyen d’enseigner en public, à ses risques et périls. Mais je réserve ce point et d’autres semblables pour un autre endroit, n’ayant voulu traiter dans ce chapitre que les questions qui se rapportent au gouvernement aristocratique.


CHAPITRE IX. DE L’ARISTOCRATIE (suite).


1. Jusqu’ici nous n’avons eu en vue que le gouvernement qui tire son nom d’une seule ville, capitale de l’empire tout entier. Voici le moment de traiter d’une aristocratie partagée entre plusieurs villes, et que je trouve pour ma part préférable à la précédente. Mais, pour reconnaître la différence de ces deux formes et la supériorité de l’une sur l’autre, nous aurons à reprendre