Page:Œuvres de Théophile Gautier - Poésies, Volume 1.djvu/164

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XVIII
Minuit est le moment voulu pour l’œuvre inique ;
Minuit sonne. — Aussitôt l’infâme Véronique
Trace de sa baguette un rond sur le plancher,
Et se place au milieu ; — des milliers de fantômes
Hors du cercle magique, ainsi que des atomes
Qu’un rayon de soleil dans l’ombre vient chercher,
Tremblent, points lumineux sur la tenture noire.
— La vieille cependant murmure son grimoire,
Pousse des cris aigus, dit des mots dont le son,
Pareil au bruit que font les marteaux d’une forge,
Vous écorche l’oreille et vous prend à la gorge
Comme une mauvaise boisson.


XIV
Mais ce n’est pas là tout, — pour finir le mystère,
Elle jette un par un ses vêtements à terre
Et se met toute nue ; — oh ! C’était effrayant ! —
Le squelette blanchi dont la bise se joue,
Et qui depuis six mois fait aux corbeaux la moue
Du haut d’une potence, est un objet riant,
Près de cette carcasse aux mamelles arides,
Au ventre jaune et plat, coupé de larges rides,
Aux bras rouges pareils à des bras de homard.
Horror ! Horror ! Horror ! comme dirait Shakspeare,
— Une chose sans nom, — impossible à décrire,
Un idéal de cauchemar !