Page:Œuvres de Théophile Gautier - Poésies, Volume 1.djvu/189

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LXVIII
Albertus, je n’ai pas besoin de vous le dire,
Est le fin cortejo que je viens de décrire
Quelques stances plus haut. — C’était un homme d’art,
Aimant tout à la fois d’un amour fanatique
La peinture et les vers autant que la musique.
Il n’eût pas su lequel, de Dante ou de Mozart,
Dieu lui laissant le choix, il eût souhaité d’être.
Mais moi qui le connais comme lui, mieux peut-être,
Je crois en vérité qu’il eût dit : — Raphaël !
Car entre ces trois sœurs égales en mérite
Dans le fond la peinture était sa favorite
Et son talent le plus réel.


LXIX
Il voyait l’univers comme un tripot infâme ;
— pour son opinion sur l’homme et sur la femme,
C’était celle d’Hamlet, — il n’aurait pas donné
Quatre maravédis des deux. — La créature
Le réjouissait peu, si ce n’est en peinture.
— S’étant toujours enquis, depuis qu’il était né,
Du pourquoi, du comment, il était pessimiste
Comme l’est un vieillard, partant plus souvent triste
Qu’autre chose, et l’amour n’était qu’un nom pour lui.
Quoique bien jeune encor, depuis longues années
Il n’y pouvait plus croire ; aussi dans ses journées,
Sonnaient bien des heures d’ennui.