Page:Œuvres de Théophile Gautier - Poésies, Volume 1.djvu/194

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Autour du mur beaucoup de toiles accrochées,
Blanches pour la plupart, les autres ébauchées,
Un chaos de couleurs ne vivant qu’à demi.
— La Lénore à cheval, Macbeth et les sorcières,
Les infants de Lara, Marguerite en prières,
Des portraits esquissés, des études parmi
Lesquelles, dans son cadre, une de jeune fille,
Claire sur un fond brun, se détache et scintille,
Belle à ne savoir pas de quel nom l’appeler,
Péri, fée ou sylphide, être charmant et frêle,
Ange du ciel à qui l’on aurait coupé l’aile
Pour l’empêcher de s’envoler.


LXXIX
On aurait dit, à voir cette tête inclinée,
Et son expression pensive et résignée,
Une Mater Dei d’après Masaccio.
— Ce n’était qu’un portrait d’une maîtresse ancienne.
La plus et mieux aimée, une vénitienne,
Qu’en sa gondole un soir, sur le Canaleio,
Un bravo poignarda. — Le mari de la belle
Avait monté ce coup, la sachant infidèle
— C’est un roman entier que cette histoire-là. —
Albertus vint au corps, leva l’étoffe noire,
Ébaucha ce portrait qu’il finit de mémoire,
Et puis jamais n’en reparla.