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Le Spectre de la Rose
1837



Soulève ta paupière close
Qu’effleure un songe virginal ;
Je suis le spectre d’une rose
Que tu portais hier au bal.
Tu me pris encore emperlée
Des pleurs d’argent de l’arrosoir,
Et parmi la fête étoilée
Tu me promenas tout le soir.

Ô toi qui de ma mort fus cause,
Sans que tu puisses le chasser,
Toute la nuit mon spectre rose
À ton chevet viendra danser.
Mais ne crains rien, je ne réclame
Ni messe ni De Profundis ;
Ce léger parfum est mon âme,
Et j’arrive du paradis.

Mon destin fut digne d’envie :
Pour avoir un trépas si beau
Plus d’un aurait donné sa vie,
Car j’ai ta gorge pour tombeau,