Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 10, 1838.djvu/110

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cou, pour forcer quelque catacombe secrète, connue, disait-il, de lui seul, et qui n’avait jamais fourni pendant sa surintendance et ne fournirait jamais à personne une bouteille de son contenu, à moins que ce ne fût à un véritable ami du roi.

« Quand le duc dîna ici, » dit le sommelier en s’asseyant à une distance de la table, parce qu’il se sentait un peu intimidé par la généalogie de Bothwell, mais néanmoins approchant sa chaise d’un pied de plus, à chaque phrase de son discours ; « quand le duc dîna ici, milady me tourmentait pour que je lui donnasse une bouteille de ce bourgogne (ici il avança un peu sa chaise) ; mais, je ne sais pas pourquoi, monsieur Stuart, je me méfiais de lui ; je le soupçonnais, monsieur, de ne pas être aussi ami du gouvernement qu’il le prétendait : je ne pensais pas qu’il fallût compter beaucoup sur cette famille. Ce vieux duc Jacques avait perdu son cœur avant de perdre sa tête, et cet homme de Worcester n’était que de mauvais pouding qui n’était bon ni à bouillir, ni à rôtir, ni à manger froid (en achevant cette observation pleine d’esprit, il compléta sa première parallèle, et commença un zig-zag à la manière d’un ingénieur expérimenté, afin de continuer à s’approcher de la table) : aussi, monsieur, plus milady criait : « Du bourgogne pour Sa Grâce, de vieux bourgogne, le bourgogne de choix, le bourgogne qu’on fit venir en trente-neuf !… » plus je me disais : Du diable s’il en avale une seule goutte jusqu’à ce que je sois plus sûr de ses principes ! du vin d’Espagne et du claret sont assez bons pour lui. Non, non, messieurs, tant que j’aurai la charge de sommelier dans cette maison de Tillietudlem, je m’engage à ce que nulle personne suspecte ou déloyale n’ait le meilleur vin de notre cave. Mais quand je puis trouver un véritable ami du roi et de sa cause, ou un épiscopalien modéré ; quand je puis trouver un homme attaché à l’Église et à la couronne, comme je l’ai été moi-même pendant la vie de mon maître, et du temps de Montrose, je crois qu’il n’y a aucune espèce de vin dans la cave, quelque bon qu’il soit, qu’on puisse se dispenser de lui offrir. »

Le sommelier était alors parvenu à s’installer dans le corps de la place, ou, en d’autres termes, il avait avancé son siège jusqu’à la table.

« Et maintenant, monsieur Francis Stuart de Bothwell, j’ai l’honneur de boire à votre santé et à votre avancement ; et puissiez-vous parvenir à purger le pays des républicains, des têtes rondes, des fanatiques et des ligueurs ! »