Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 10, 1838.djvu/163

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lui arrive tout juste quand il en est au plus curieux, et la longue harangue qu’il a faite ce matin lui est bien contraire… Du diable si je ne souhaiterais pas qu’il criât plus fort qu’elle, afin de la faire taire, car alors il serait seul pour répondre de tout… Heureusement que la route est pierreuse et que le bruit des pieds des chevaux empêche les cavaliers d’entendre ce qu’ils disent ; mais que nous arrivions sur une terre battue et nous aurons des nouvelles de tout ceci. »

Les conjectures de Cuddie n’étaient que trop vraies. Les paroles des prisonniers n’avaient guère été entendues tant qu’elles avaient été couvertes par le bruit des pieds des chevaux sur un chemin inégal et pierreux ; mais alors ils entraient dans les terres marécageuses, où la prédication des deux zélés captifs n’avait plus cet accompagnement ; et par conséquent, dès que leurs chevaux eurent commencé à fouler la bruyère et la verdure, Gabriel Kettledrummle éleva encore la voix en disant : « Ainsi s’élève ma voix comme celle du pélican dans le désert… — Et moi, disait Mause, comme le moineau sur le toit de la maison… — Holà, ho, s’écria le caporal à l’arrière-garde, « bridez vos langues ; que le diable les brûle, ou j’y accrocherai une martingale. — Je n’obéirai pas aux ordres des profanes, dit Gabriel. — Ni moi non plus, dit Mause, à la requête d’un tesson de terre, quand il serait peint aussi rouge qu’une brique de la tour de Babel, et qu’il s’appellerait un caporal. — Holliday, s’écria le caporal, tu n’aurais pas un bâillon sur toi, mon homme ?… il faut que nous arrêtions leurs langues, de peur d’en être assourdis. » Avant qu’on eût eu le temps de lui répondre, ou qu’on eût pu exécuter la menace du caporal, un dragon vint au galop au-devant du sergent Bothwell, qui devançait de beaucoup sa petite troupe. Après avoir reçu les ordres qu’on lui apportait, Bothwell retourna vers sa troupe, lui ordonna de serrer les rangs, de doubler le pas, et d’avancer en silence et avec précaution, attendu qu’ils seraient bientôt en présence de l’ennemi.