Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 10, 1838.djvu/165

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geur qui parcourt seul un pays fertile et cultivé. Ce ne fut donc pas sans une singulière émotion que Morton aperçut à un demi-mille environ le corps de cavalerie auquel appartenait son escorte, gravissant péniblement un sentier rapide et sinueux qui conduisait de la plaine dans les montagnes. Leur nombre, qui paraissait considérable quand ils étaient groupés dans des routes étroites et qui se multipliait lorsqu’on les voyait passer un à un entre les arbres semblait diminué lorsqu’ils étaient pleinement exposés aux regards et dans un site dont l’étendue était si grande en comparaison de cette colonne de cavalerie, qu’on l’aurait plutôt prise pou un vaste troupeau de bestiaux que pour une troupe de soldats.

« Certes, se disait Morton, une poignée d’hommes résolus pourrait défendre tous les défilés de ces montagnes contre une force aussi exiguë que celle-ci, pourvu que leur bravoure égalât leur enthousiasme. »

Pendant qu’il se livrait à ces réflexions, la course rapide des cavaliers qui le gardaient leur fit bientôt traverser l’espace qui les séparait de leurs compagnons ; et avant que la tête de la colonne de Caverhouse eût atteint le sommet de la montagne qu’ils gravissent, Bothwell, son arrière-garde et ses prisonniers, s’étaient réunis, ou peu s’en fallait, au corps principal conduit par son commandant. L’extrême difficulté de la route, qui en quelques lieu était escarpée, dans d’autres marécageuse, retarda les progrès de la colonne, surtout vers la queue ; car le passage du gros du corps, dans plusieurs endroits, avait fait enfoncer les marécages qu’il traversait, de sorte que les derniers étaient obligés de quitter le chemin battu et d’en former un nouveau moins dangereux.

Dans ces circonstances, la détresse du révérend Gabriel Kettledrumle et de Mause Headrigg était de beaucoup augmentée, car l’escorte brutale qui les conduisait les contraignait, malgré le risque que devaient courir des cavaliers aussi inexpérimentés, à faire sauter leurs chevaux par-dessus des tranchées et des ravins, où à les pousser au travers des marécages ou des flaques d’eau.

Grâces au secours du Seigneur, j’ai franchi une muraille, » s’écriait la pauvre Mause au moment où son cheval avait été contraint par ses conducteurs à franchir le tertre de bruyère qui servait d’enclos à une bergerie abandonnée, et dans ce haut fait elle avait laissé envoler son bonnet, ce qui laissait ses cheveux gris à découvert.