Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 10, 1838.djvu/209

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Il porta la main à son chapeau pour leur dire adieu, et serra cordialement celle du major Bellenden.

« Adieu, dit-il, mon vieil et brave ami ! que le bonheur soit avec vous, et un meilleur temps viendra pour nous deux. »

Grâce aux efforts du major Allan, les escadrons s’étaient reformés ; et quoique leurs habits fussent moins brillants et couverts de boue, ces hommes avaient un air plus martial et plus régulier en quittant pour la seconde fois la tour de Tillietudlem que quand ils y étaient arrivés après leur déroute.

Le major Bellenden, abandonné maintenant à ses propres ressources, fit partir plusieurs vedettes, soit pour obtenir des provisions, et surtout de la farine d’avoine, soit pour reconnaître les mouvements de l’ennemi. Toutes les nouvelles semblaient prouver que les insurgés avaient intention de passer la nuit sur le champ de bataille. Mais eux aussi avaient fait partir leurs détachements et leurs gardes avancées pour recueillir des provisions, et les fermiers n’étaient pas peu embarrassés en recevant des ordres contraires, ici au nom du roi, là au nom de l’Église ; l’un leur ordonnant d’envoyer des provisions au château de Tillietudlem, l’autre leur enjoignant d’en faire parvenir au camp des pieux partisans de la vraie religion, qui étaient maintenant sous les armes pour la réforme et le covenant, à Drumclog, près de Loudon-Hill. Chaque ordre se terminait par la menace de mort ou d’incendie, s’ils ne s’empressaient d’y répondre ; car ni l’un ni l’autre des partis ne se fiait assez à la loyauté ou au zèle de ceux à qui l’on s’adressait, pour s’attendre à les voir se séparer de leur bien à d’autres conditions : de sorte que les pauvres gens ne savaient plus de quel côté se tourner ; et en effet, plus d’un ménagea les deux partis.

" Ces temps funestes feront tourner la tête au plus sage, dit Niel Blane, l’hôte prudent de la taverne ; « mais j’ai toujours soin de conserver mon sang-froid. Jenny, combien y a-t-il de farine d’avoine dans la grande caisse ? — Quatre boisseaux de farine d’avoine, deux boisseaux d’orge, et deux de pois, répondit Jenny. — C’est bien, ma chère, » continua Niel Blane en soupirant profondément ; « que Bauldy conduise le pois et la farine d’orge au camp de Drumclog. Il est républicain, et était le garçon de charrue de notre défunte ménagère. Les gâteaux d’orge conviendront bien à leurs estomacs grossiers. Il faut qu’il dise que c’est la dernière once de farine qu’il y a dans la maison, ou s’il répugne à dire un mensonge, ce qui ne serait pas raisonnable quand il s’agit de l’in-