Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 10, 1838.djvu/229

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la pauvre vieille femme ! si Votre Honneur n’a pas d’ordres à me donner. — Mais, Cuddie, je ne puis réellement prendre tout cela sans vous récompenser. — Prenez toujours, monsieur ; vous songerez une autre fois à me récompenser. J’ai pris pour moi quelques objets qui me convenaient mieux. Que ferais-je des brillants habits de lord Evandale ? ceux du sergent Bothwell me suffiront. »

Ne pouvant vaincre le désintéressement obstiné de son serviteur et lui faire rien accepter de ces dépouilles, Morton résolut de profiter de la première occasion pour rendre à lord Evandale, s’il vivait encore, ce qui lui appartenait : et, en attendant, il n’hésita pas à user de ce que Cuddie avait pris, seulement pour changer de linge et se servir de quelques objets utiles et de peu de valeur que renfermait le porte-manteau.

Il regarda ensuite les papiers qui se trouvaient dans le portefeuille de Bothwell. Ils étaient de plusieurs espèces. Il y avait le contrôle de ses soldats, avec les noms de ceux qui étaient en congé ; des mémoires de tavernes, une liste de suspects à poursuivre et à mettre à l’amende, avec la copie d’un mandat du conseil privé pour arrêter certaines personnes de distinction qui y étaient désignées. Morton trouva aussi une ou deux commissions que Bothwell avait reçues à différentes époques, et des certificats de ses services en pays étrangers, où l’on faisait le plus grand éloge de son courage et de ses talents militaires. Mais la pièce la plus remarquable était un tableau fort détaillé de sa généalogie, avec renvois à des documents qui en justifiaient l’authenticité ; il était accompagné d’une liste des vastes domaines confisqués sur les comtes de Bothwell, avec les noms des courtisans et seigneurs auxquels le roi Jacques VI les avait donnés et dont les descendants en étaient encore possesseurs ; au-dessous de cette liste était écrite en lettres rouges, de la main de Bothwell : Haud immemor, F. S. C. B., initiales qui signifiaient, sans doute, François Stuart, comte de Bothwell. Avec les documents qui peignaient si bien le caractère et les sentiments du propriétaire, il y en avait d’autres qui le montraient sous un tout autre jour que ne l’ont vu jusqu’ici nos lecteurs.

Dans un secret du portefeuille, que Morton ne découvrit pas sans difficulté, étaient une ou deux lettres d’une belle écriture de femme. Elles avaient bien vingt ans de date, ne portaient point d’adresse, et n’étaient signées que par des initiales. Sans avoir le temps de les lire en entier, Morton reconnut qu’elles contenaient