Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 10, 1838.djvu/300

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s’éloigner des enfants du Covenant. Il n’a pas pris un vêtement babylonien ; mais il a vendu le vêtement de la justice à la femme babylonienne ; il n’a pas pris cent pièces d’argent, mais il a trafiqué de la vérité, qui est plus précieuse que l’or et l’argent. »

À cette attaque furieuse, dirigée inopinément contre un de leurs principaux chefs, le tumulte se répandit dans l’assemblée des presbytériens. Quelques-uns demandaient qu’on procédât sur-le-champ à l’élection de nouveaux officiers, et qu’on ne nommât aucun de ceux qui par leurs discours ou par leurs actions auraient montré plus ou moins de faiblesse pour les hérésies et la corruption des temps. Telles étaient les demandes des caméroniens. Ils s’écriaient que quiconque n’était pas avec eux était contre eux ; que ce n’était pas le moment de renoncer à la partie essentielle du Covenant, quand ils avaient un si grand besoin que le ciel bénît leurs armes et leur cause ; qu’à leurs yeux un presbytérien tiède ne valait guère mieux qu’un papiste, un ennemi du Covenant, un homme sans foi.

Les modérés repoussaient avec indignation et mépris le reproche qu’on leur faisait d’avoir, par une criminelle condescendance, déserté la cause de la vérité. Ils reprochaient à leurs accusateurs d’avoir brisé l’unité de croyance ; d’avoir, par les emportements d’un zèle extravagant, introduit la division dans l’armée, quand, au jugement des plus hardis, ses forces réunies suffisaient à peine pour résister à leurs ennemis. Poundtext et un ou deux autres faisaient d’inutiles efforts pour calmer la fureur croissante des deux partis en leur répétant ces paroles du patriarche : « Qu’il n’y ait point de querelle entre vous et moi, ni entre vos bergers et les miens, car nous sommes frères ; » ces paroles pacifiques ne pouvaient être entendues. Ce fut en vain que Burley lui-même, quand il vit la dissension portée à un si haut point, éleva sa voix sombre et forte pour recommander le silence et le respect de la discipline : l’esprit d’insubordination n’avait plus de bornes, et on eût dit que l’exhortation d’Habakkuk Mucklewrath avait communiqué une partie de son fanatisme à tous ceux qui l’avaient entendu. Les plus sages ou les plus timides étaient prêts à se retirer, et à abandonner une cause qu’ils regardaient comme perdue. Les autres inclinaient pour un appel harmonieux, comme ils l’appelaient assez improprement, c’est-à-dire pour la nomination de nouveaux officiers et le renvoi de ceux qui avaient été récemment élus, et cela avec un tumulte et des cris vraiment dignes de