Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 10, 1838.djvu/308

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À ces mots il tourna bride et sortit de la mêlée. Morton vit alors qu’en continuant ses inutiles efforts pour rallier les fuyards, il ne pourrait que les faire tuer ou se faire prendre ; suivi du fidèle Cuddie, il se tira de la foule ; et, comme il était bien monté, il fit sauter son cheval par-dessus deux ou trois clôtures et gagna la plaine.

De la première colline qu’ils gravirent, ils regardèrent derrière eux et virent leurs malheureux compagnons poursuivis de tous côtés par les dragons. Les vociférations et les cris de joie que poussaient ces derniers en égorgeant leurs ennemis vaincus, se confondaient avec les gémissements et les cris de ces victimes immolées à leur rage.

« Il est impossible, dit Morton, que notre armée puisse jamais tenir tête de nouveau aux royalistes. — La tête lui a été coupée comme je couperais celle d’une ciboule, répliqua Cuddie. Eh ! Seigneur ! voyez comme les larges épées brillent. La guerre est une terrible chose. Bien fin qui m’y rattrapera. Mais, pour l’amour de Dieu ! monsieur, cherchons un endroit où nous puissions un peu reprendre haleine. »

Morton sentit la nécessité de suivre le conseil de son fidèle écuyer. Ils remirent leurs chevaux à un bon pas, et ils le continuèrent sans interruption, dirigeant leur course vers la contrée la plus sauvage et la plus montagneuse, où ils supposaient qu’une partie des fugitifs se rassembleraient pour se défendre ou pour obtenir une capitulation.






CHAPITRE XXXIII.

la délivrance.


Il demande au ciel le cœur du lion, l’âme du tigre et leur férocité.
Fletcher.


Le soir était venu, et depuis deux heures Morton et son fidèle serviteur n’avaient vu aucun de leurs infortunés compagnons, quand ils atteignirent une bruyère et aperçurent une grande ferme isolée, située à l’entrée d’une ravine sauvage et loin de toute autre habitation.

« Nos chevaux, dit Morton, ne peuvent nous mener plus loin, sans avoir pris un peu de repos et quelque nourriture : il faut tâcher d’obtenir l’un et l’autre ici. »