Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 10, 1838.djvu/311

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ment. « La parole que tu as méprisée deviendra un roc pour t’écraser et t’anéantir : la lance que tu voudrais avoir brisée te percera le sein : nous avons prié, nous avons gémi, nous avons demandé au ciel de nous envoyer une victime à offrir en holocauste afin d’expier les péchés de la congrégation ; et voilà que la tête même du coupable est remise entre nos mains. Il s’est introduit par la fenêtre comme un voleur ; c’est un bélier trouvé dans le bois, dont le sang sera une offrande agréable pour racheter l’Église de la vengeance, et ce lieu sera à l’avenir appelé Jehovah Jirah, car le sacrifice est résolu. Allons, liez la victime avec des cordes aux coins de l’autel. »

Il se fit un mouvement parmi ces hommes, et Morton, en ce moment, regrettait bien la précipitation imprudente avec laquelle il s’était aventuré dans leur compagnie. Il avait pour toute arme son épée, ses pistolets étant restés à l’arçon de sa selle ; et comme les whigs étaient tous munis d’armes à feu, il ne pouvait guère espérer de pouvoir leur résister avec succès. Cependant l’intercession de Macbriar le sauva pour un moment.

« Attendez encore un moment, mes frères ; ne tirons pas le glaive avec précipitation, de peur que le sang innocent ne retombe sur nos têtes !… Approche, » dit-il en s’adressant à Morton, « nous compterons avec toi avant de venger la cause que tu as trahie. Ne t’es-tu pas, dans toutes les assemblées de l’armée, montré sourd comme la pierre à la parole de vérité ? » — Oui, oui, » murmurèrent d’une voix sombre les assistants. — Il a toujours conseillé la paix avec les mécréants, dit l’un. — Et plaidé pour le noir et abominable crime de l’indulgence, dit un autre. — Et il aurait voulu livrer l’armée aux mains de Montmouth, ajouta un troisième. Il a été l’un des premiers à abandonner l’honnête et brave Burley quand il défendait encore le passage. Je l’ai vu dans la plaine, les flancs de son cheval ensanglantés par l’éperon, long-temps avant que le feu eût cessé près du pont. — Messieurs, dit Morton, si vous avez résolu de m’intimider par vos clameurs et de me condamner sans m’entendre, cela est peut-être en votre pouvoir ; mais vous répondrez de ce meurtre devant Dieu et devant les hommes. »

De nouveaux murmures accueillirent cette réponse.

« Écoutez ce jeune homme, je vous le dis, reprit Macbriar ; car le ciel sait que nos entrailles se sont émues de compassion sur lui : nous voudrions qu’il pût apprendre à connaître la vé-