Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 10, 1838.djvu/318

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

tait pas armé, il faudra lui faire subir un petit interrogatoire ; ou, ce qui serait mieux peut-être, je le ferai conduire devant le conseil privé. Il devrait bien me soulager d’une partie de cette besogne dégoûtante… Qu’on traite M. Morton avec respect… Veillez à ce que vos hommes pansent leurs chevaux ; que mon domestique lave le dos de Wildblood avec du vinaigre : la selle l’a un peu blessé. »

Ces différents ordres furent donnés par Claverhouse sur le même ton et avec une tranquillité si parfaite, qu’il n’avait pas l’air de regarder l’un comme plus important que l’autre.

Les caméroniens qui, si peu d’instants auparavant, méditaient une sanglante exécution, étaient maintenant sur le point d’en subir eux-mêmes une semblable ; ils semblaient également préparés pour l’un comme pour l’autre de ces terribles rôles. Aucun d’eux ne laissa paraître le moindre signe d’effroi quand on leur ordonna de sortir de la chambre pour marcher à la mort. Leur sauvage enthousiasme les soutint dans ce moment si redoutable, et ils partirent avec un regard intrépide et en silence : un seul d’entre eux, en quittant la chambre, regarda en face Claverhouse, et lui dit d’une voix sévère et ferme : « La vengeance tombera sur l’homme violent. » Graham ne lui répondit que par un sourire de mépris.

Aussitôt qu’ils furent sortis, Claverhouse prit quelque nourriture qu’un ou deux de ses soldats avaient préparée à la hâte ; il invita Morton à suivre son exemple, remarquant que la journée avait été très fatigante pour eux. Morton ne put manger : la révolution soudainement opérée dans son sort, ce passage inespéré du bord de la tombe à la vie, avait causé en lui une violente secousse, mais il avait une soif dévorante, et il demanda à boire.

« Je vous ferai raison de tout mon cœur, dit Claverhouse, car voici un pot plein d’ale, et elle doit être bonne : les whigs ne manquent jamais de découvrir la meilleure. À votre santé, monsieur Morton, » dit-il en remplissant un verre pour lui tandis qu’il en présentait un autre à son prisonnier.

Morton portait le verre à la bouche quand une décharge de mousqueterie, suivie d’un profond et douloureux gémissement deux ou trois fois répété et plus faible à chaque fois, annonça que les trois hommes qui venaient de sortir recevaient le coup de la mort. Il tressaillit, et remit le verre sur la table sans y goûter.

« Vous êtes encore jeune pour ces sortes de choses, monsieur