Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 10, 1838.djvu/414

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devient intéressant. On pourrait le comparer à votre thé, excellent hyson pourtant, qui est nécessairement plus faible et plus insipide à la dernière tasse, si bien que le plus gros morceau de sucre ne pourrait suppléer à la saveur qu’il a perdue. Ainsi, une narration qui déjà a cessé d’intéresser, devient tout à fait fastidieuse lorsque l’auteur y ajoute le détail de circonstances prévues d’avance, épuisât-il, pour les raconter, toutes les richesses d’un style fleuri. — Tout cela ne signifie rien, monsieur Pattieson ; vous avez, je puis le dire, brusqué votre dénoûment. Je souffletterais la dernière apprentie qui terminerait un bonnet avec si peu de façons ; et je vous déclare que vous ne serez pas considéré comme ayant rempli votre tâche, si vous ne nous racontez tout ce qui se passa au mariage d’Édith et de Morton, et si vous ne nous dites ce que devinrent tous les autres personnages, depuis lady Marguerite jusqu’à Goose-Gibbie. — Eh bien, mademoiselle, j’ai tous les matériaux propres à satisfaire votre curiosité, à moins qu’elle ne veuille descendre jusqu’aux plus minutieux détails. — Premièrement donc, car c’est là l’essentiel, lady Marguerite rentra-t-elle en possession de sa fortune et de son château ? — Oui, mademoiselle, et de la manière la plus simple, c’est-à-dire en qualité d’héritière de son digne cousin Basile Olifant, qui, étant mort sans avoir fait de testament, non seulement rétablit, mais même augmenta la fortune de ceux que, durant sa vie, il avait poursuivis avec la malice la plus envenimée. John Gudyill, rétabli dans sa charge, se montra plus important que jamais : et Cuddie, avec un transport de joie inexprimable, reprit la culture des champs de Tillietudlem, et rentra dans son ancienne métairie ; mais, avec la prudence un peu timide que vous lui connaissez, jamais il ne se vanta d’avoir tiré l’heureux coup de fusil qui avait rouvert à sa maîtresse et à lui-même les portes de leur première habitation. « Après tout, » dit-il à Jenny qui était son unique confidente, « Basile Olifant était le cousin de milady et un grand seigneur ; et quoique, suivant moi, il ait agi illégalement, car il n’exhiba aucun ordre, et ne fit à lord Evandale aucune sommation de se rendre, quoique je n’aie pas plus de remords de l’avoir tué que s’il n’était qu’un coq de bruyère, le plus sûr est de garder là-dessus un profond silence. » Il ne s’en tint pas là ; car il imagina un conte assez ingénieux par lequel il attribuait ce fait à John Gudyill, ce qui lui valut plus d’un verre d’eau-de-vie de la part du vieux sommelier ; car, bien différent en cela de Cuddie, il avait une forte propension