Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 11, 1838.djvu/303

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qui, accompagné de son fidèle Craigengelt, se présenta dans la matinée pour conclure le mariage projeté et signer le contrat.

Ce contrat avait été soigneusement rédigé sous l’inspection de sir William Ashton lui-même, et il avait été décidé, sous prétexte du mauvais état de la santé de miss Ashton, que l’on n’admettrait à le signer que les parties immédiatement intéressées, et que la célébration du mariage aurait lieu le quatrième jour après la signature. Cette mesure avait été adoptée par lady Ashton, afin que Lucy n’eût pas le temps de revenir sur ce qu’elle aurait fait, ou de se montrer de nouveau intraitable. Il n’y avait pourtant pas la moindre apparence qu’elle fût disposée à l’un ou à l’autre. Elle entendit proposer tous ces arrangements avec la calme indifférence du désespoir, ou plutôt avec une apathie produite par l’état d’oppression et de stupéfaction de son cœur. À des yeux aussi peu pénétrants que ceux de Bucklaw, sa contenance n’offrait pas une répugnance prononcée ; il n’y voyait que cette réserve qui convient à une fille jeune et timide, quoique cependant il ne pût se dissimuler qu’elle agissait plutôt par soumission à la volonté de ses parents que par aucune prédilection en sa faveur.

Après que le futur époux eût présenté ses hommages à sa fiancée, on la laissa quelque temps à elle-même, sa mère ayant fait observer que le contrat devait être signé avant midi pour que le mariage fût heureux.

Lucy se laissa habiller pour la cérémonie, d’après le goût des femmes qui la servaient, et sa parure fut magnifique ; sa robe était de satin blanc, avec des garnitures de dentelle de Bruxelles ; ses cheveux étaient entremêlés d’une profusion de diamants, dont l’éclat contrastait singulièrement avec la pâleur mortelle de son visage et le trouble qui se lisait dans son œil égaré.

Sa toilette était à peine terminée que Henri se présenta pour conduire la fiancée, ou plutôt la muette victime, dans le grand salon, où tout était prêt pour la signature du contrat.

« Savez vous, ma sœur, lui dit-il, que je suis bien aise, après tout, que vous épousiez Bucklaw au lieu de Ravenswood, qui avait la fierté d’un grand d’Espagne, et qui semblait n’être venu ici que pour nous couper le cou et nous marcher ensuite sur le corps ? Je suis charmé que la mer soit aujourd’hui entre lui et nous ; car je n’oublierai jamais combien je fus effrayé quand, la première fois que je le vis, il me sembla que le portrait du vieux sir Malise s’était détaché de la toile. Soyez vraie, Lucy : n’êtes-