Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 13, 1838.djvu/120

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plus favorisé par l’abbé, selon l’état des choses à cette époque. Le sous-prieur lui fit entendre encore qu’il fallait s’unir d’intérêts avec le monastère. Pendant quelques instants, il écouta avec patience les réponses grossières et injurieuses du gardien ; mais à force de lui tenir devant les yeux ses propres avantages, il eut la satisfaction de voir que Pierre s’adoucit peu à peu, et consentit à laisser passer franc de péage, jusqu’à la Pentecôte suivante, tout pèlerin qui voyagerait à pied ; ceux qui voyageraient à cheval ou autrement devaient encore se soumettre au droit ordinaire. Ayant ainsi arrangé une affaire à laquelle le bien-être du couvent était grandement intéressé, le père Eustache continua son voyage.


CHAPITRE VIII.


mort de lady avenel.


Ne joue pas avec le temps, trésor du sage, et dont les fous sont prodigues. Le fatal pêcheur accroche des âmes pendant que nous perdons des moments.
Vieille comédie.


Un brouillard du mois de novembre couvrait la petite vallée le long de laquelle le moine Eustache s’avançait lentement, mais avec fermeté. Il n’était pas sans éprouver un sentiment de mélancolie, inspiré par le lieu et par la saison. Le fleuve semblait couler avec un murmure sourd et profond, comme s’il se fût affligé du départ de l’automne. Parmi les bouquets d’arbres épars çà et là sur ses rives, le chêne seul n’avait pas encore abandonné son vert pâle pour prendre une teinte rougeâtre ; les feuilles du saule, la plupart détachées de leurs branches, frémissaient au moindre souffle, et bruissaient sous chaque pas de la mule, tandis que le feuillage des autres arbres, entièrement flétri, se maintenait encore sur les tiges, prêt à céder au premier vent qui passerait à cette hauteur.

Le moine se laissa entraîner dans la suite naturelle de pensées que ces emblèmes de la fragilité des espérances de l’homme inspirent surtout à cette époque de l’année. Telles sont, dit-il en regardant les feuilles dont la terre se couvrait autour de lui, telles sont les espérances dont la jeunesse se repaît d’abord, formées de