Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 13, 1838.djvu/149

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— Je te retrouverai avant long-temps, brigand que tu es, et je t’enseignerai à dire tes Oremus.

— Je ferai une visite à ton bétail, au clair de la lune, dit Christie de Clint-Hill.

— Je te serrerai le cou l’une de ces matinées brumeuses, voleur achevé, » répondit le bras séculier de l’Église.

« Jamais voleur plus achevé que toi n’est monté à cheval, rétorqua Christie, et si les vers pouvaient une fois venir se régaler de ta grasse carcasse, je pourrais espérer d’obtenir la survivance de ton métier par la faveur de ces révérends pères.

— Un plat de leur métier et un du mien, répondit le bailli, un confesseur et une corde, voilà tout ce que tu obtiendras de nous. »

Le sous-prieur s’apercevant que ses frères prenaient à cette contestation, entre la justice et l’iniquité, un intérêt plus grand que le strict décorum ne le permettait, les pria de se retirer l’un et l’autre. « Bailli dit-il, emmenez vos hallebardiers, et n’inquiétez plus cet homme que nous avons absous. Et toi, Christie, ou, quel que soit ton nom, pars, et souviens toi que tu dois la vie à la clémence du seigneur abbé.

— Ah ! pour cela, répondit Christie, je pense que c’est à vous que je la dois ; mais dites comme vous l’entendez, il est certain que je dois une vie à ce couvent ; et c’est une affaire finie. » Et il sortit en sifflant, de l’air d’un homme qui regarde la vie qu’on a bien voulu lui laisser comme ne méritant pas de plus grands remercîments.

— Endurci jusqu’à la brutalité ! dit le père Eustache ; et cependant qui sait s’il n’y a pas quelque métal précieux caché sous cette grossière enveloppe ?

— Sauvez un voleur de la potence, dit le sacristain… vous connaissez le reste du proverbe ; mais, en supposant, ce que le ciel veuille bien nous accorder, que ce féroce brigand ne cherche ni à nous ôter la vie, ni même à nous blesser, qui nous garantira son respect pour notre froment, notre orge, et nos troupeaux de toute espèce ?

— Ce sera moi, mes frères, dit un vieux moine. Ah ! mes frères, vous ne connaissez pas le parti que l’on peut tirer d’un voleur repentant. Du temps de l’abbé Ingilram… oui, je m’en souviens comme si c’était d’hier, les maraudeurs qui venaient à Sainte-Marie y étaient toujours reçus avec plaisir. Oui, ils payaient la dîme