Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 13, 1838.djvu/335

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fidèle catholique qui avait cherché un refuge à l’abbaye de Sainte-Marie, c’était selon le sous-prieur, une action indigne et qui méritait la malédiction du ciel. D’ailleurs elle n’était pas sans danger temporel. Si le gouvernement d’Écosse était maintenant dans les mains du parti protestant, la reine était toujours catholique : et qui pouvait savoir dans combien de temps, au milieu des changements subits qui agitaient le pays, elle pouvait se trouver à la tête de ses affaires et protéger sa religion ? Enfin, si la cour et la reine d’Angleterre étaient protestants zélés, les comtés du Nord, dont l’amitié ou l’inimitié était importante pour la communauté de Sainte-Marie, contenaient beaucoup de catholiques, dont les principaux étaient certainement disposés à venger toute mesure sévère prise à l’égard de sir Piercy.

De toutes parts, le sous-prieur voyait les plus grands risques d’encourir le blâme, les incursions ou la confiscation. Le seul moyen était de rester au gouvernail, en pilote résolu de veiller à tous les événements, et de faire de son mieux pour éviter les écueils, abandonnant le reste au ciel et à sa patrone.

Quand il sortit de l’appartement, le chevalier le fit rappeler pour lui dire que puisqu’il devait passer la nuit dans cette chambre, il désirait qu’on lui apportât ses malles, afin de changer quelque chose à son costume.

« Oui, oui, » murmura le moine en descendant l’escalier tournant, « portez-lui ses fadaises en toute hâte. Hélas ! faut-il que l’homme, qui a tant de buts utiles et nobles à atteindre, s’amuse avec un colletin lacé et un bonnet à sonnettes. Maintenant, allons remplir une tâche bien triste, et consoler celle qui est inconsolable, une mère qui pleure son premier-né. »

Après avoir frappé un petit coup, il s’avança dans l’appartement des femmes. Il trouva Marie Avenel très-malade et couchée ; la dame Glendinning et Tibbie s’abandonnaient à leur douleur auprès d’un feu à moitié éteint et à la lueur d’une petite lampe de fer. La pauvre Elspeth avait jeté son tablier sur sa tête ; elle sanglotait amèrement et pleurait « son beau, son brave Halbert, le portrait vivant de son cher Simon Glendinning, la consolation de son veuvage et le soutien de sa vieillesse. »

La fidèle Tibbie répétait ces plaintes d’une manière plus bruyante, et elle faisait de vives menaces de vengeance sur sir Piercy Shafton, « tant qu’il resterait en Écosse un homme qui pût manier le poignard et une femme qui pût filer une corde. »