Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 13, 1838.djvu/376

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comme un criminel, répéta-t-il ; mais plutôt, l’un comme un fananatique oppresseur, et l’autre comme une victime soumise et dévouée. Et moi aussi, ne puis-je pas vous demander : Qu’est devenue cette riche moisson d’espérances que faisaient naître vos études classiques ? où vous ont conduit cette force puissante de raisonnement et ces nombreuses connaissances qui faisaient remarquer William Allan ? Dans la cellule d’un cloître, au milieu d’un essaim de fainéants, et distingué d’eux par la noble mission d’exécuter les hautes-œuvres de Rome contre tous ceux qui lui résistent !

— Ce n’est ni à toi, je te l’assure, ni à nul mortel en ce monde, que je rendrai compte du pouvoir dont l’Église a pu m’investir ; c’est un dépôt qui m’a été confié dans l’intérêt de sa gloire, et sa gloire sera toujours le but de tous mes travaux ; j’affronterai pour elle tous les périls sans être influencé ni par la crainte ni par la faveur.

— Je n’en attendais pas moins de votre aveugle dévouement ; mais si vous avez rencontré en moi l’homme sur qui vous pouvez impunément exercer votre tyrannique autorité, comptez que son cœur saura défier vos efforts, de même que les neiges du Mont-Blanc que nous avons visitées ensemble défient l’ardeur des soleils d’été.

— Je te crois ; je suis persuadé en effet que ton cœur est aussi dur qu’un métal sur qui la force ne peut rien. Écoute donc la voix de la persuasion. Discutons en matière de religion comme nous avions coutume de faire pour nos disputes de collège, en ce temps heureux où nous passions des heures et quelquefois des journées entières à exercer nos facultés intellectuelles. Tu finiras peut-être par reconnaître la voix du berger, et par revenir au grand bercail.

— Non, Allan, ce n’est pas ici une question d’amour-propre sur laquelle des scoliastes rêveurs peuvent aiguiser leur intelligence jusqu’à ce qu’ils aient emporté la pièce ; les erreurs que je combats ressemblent à ces esprits qu’on ne peut chasser que par le jeûne et la prière. Hélas ! on compte bien peu d’élus parmi les philosophes et les savants. La chaumière et le hameau condamnent maintenant les écoles et leurs disciples. Ta sagesse même, qui n’est que folie, te fait regarder, de même qu’aux anciens de la Grèce, comme folie ce qui est la véritable sagesse.

— Ce sont, dit le sous-prieur avec sévérité, « les vaines déclamations d’un aveugle enthousiaste qui méconnaît la science et