Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 13, 1838.djvu/424

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cardinal Beatoun, ce champion adroit et déterminé de Rome, l’ami de cœur de notre remuant primat de Saint-André. Eustache, naguère sous-prieur de Kennaquhair, en est maintenant abbé ; comme un second pape Jules, il lève des troupes, passe des revues, et se prépare à combattre Foster, aussitôt son arrivée. Il faut empêcher cette rencontre, » dit Murray précipitamment ; « quel que soit le parti qui remporte la victoire, une telle bataille ne peut que nous être fatale. Qui commande les troupes de l’abbé ?

— Notre ancien et fidèle allié, Julien Avenel ; rien moins que cela, répondit Morton.

— Glendinning, s’écria Murray, fais sonner le boute-selle, que tout ce qui nous aime soit à cheval sur le champ… Oui, milord, c’est une fatale circonstance. Si nous prenons parti pour nos amis d’Angleterre, tout le pays criera honte sur nous ; les vieilles femmes nous attaqueront avec leurs fuseaux et leurs quenouilles, les pierres mêmes s’élèveront contre nous ; nous ne pouvons risquer une telle infamie. Et ma sœur me retirera tout à fait sa confiance, que j’ai déjà tant de peine à conserver. Si, d’un autre côté, nous nous opposons aux forces de l’Angleterre, Élisabeth nous accusera de protéger ses ennemis, et nous perdrons son appui.

— Et le dragon femelle[1] est, à tout prendre, la meilleure de nos cartes, ajouta Morton ; cependant, j’avoue que ce serait à contre cœur que je resterais dans l’inaction. et je verrais d’un mauvais œil des lames anglaises tailler la chair écossaise. Mais que diriez-vous d’une route faite à l’aise de manière à ne pas éreinter nos chevaux ? Taureaux et dogues, moines et archers, pourraient se battre sans nous porter préjudice, et personne ne pourrait nous blâmer de ce qui serait arrivé pendant notre absence.

— Tout le monde nous blâmerait, James Douglas, répondit Murray ; nous perdrions la confiance des deux partis ; il vaut mieux marcher avec la plus grande célérité et faire ce que nous pourrons pour entretenir la paix entre eux. Je voudrais que le cheval qui amena dans l’Écosse ce Piercy Shafton se fût rompu le cou sur la plus haute cime du Northumberland. Est-ce un pareil faquin qui doit faire tant de tapage, et donner lieu peut-être à une guerre nationale ?

— Si nous eussions été avertis à temps, reprit Douglas, nous

  1. La reine Élisabeth. a. m.