Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 14, 1838.djvu/207

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que vous ne la tirerez du fourreau qu’après en avoir reçu l’ordre exprès de votre souveraine légitime. On connaît votre caractère ardent, et l’audace avec laquelle vous vous mêlez des querelles d’autrui ; c’est donc une pénitence qui vous est imposée par ceux qui vous veulent du bien, et dont la main influera sur votre destinée. Voilà ce que j’étais chargé de vous dire. Ainsi voulez-vous donner une belle parole pour une belle épée ? il faut m’engager votre promesse formelle, et sur l’honneur. Sinon, je reporterai Caliburn[1] à ceux qui vous l’envoient.

— Et ne puis-je vous demander le nom de ces personnes ? » dit Roland, admirant en même temps la beauté de l’arme qu’on lui offrait.

« Ma commission ne me permet nullement de répondre à une pareille question.

— Mais si je suis offensé, ne puis-je tirer cette épée pour me défendre ?

— Non pas cette épée ; mais vous avez la vôtre à vos ordres, et d’ailleurs pourquoi portez-vous votre poignard ?

— Pour rien de bon, » interrompit Adam Woodcock qui venait de s’approcher des deux jeunes gens ; « et c’est ce dont je puis vous rendre témoignage aussi bien que tout autre.

— Retirez-vous, bon homme, répliqua le messager ; vous avez une face de curiosité intrusive[2], qui rencontrera un soufflet si on la trouve où elle n’a que faire.

— Un soufflet ! mon jeune maître mal appris, » dit Adam en s’éloignant, « retenez votre poing, ou, par Notre-Dame un soufflet en attirera un autre.

— Modérez-vous, Adam, dit Roland Græme. Permettez-moi, mon beau monsieur, puisque vous préférez que je vous appelle ainsi pour le moment : ne puis-je pas dégainer une fois cette arme magnifique, dans le simple but de savoir si la lame répond à une si belle poignée et à un aussi beau fourreau ?

— Nullement ! en un mot, il faut la prendre sous la promesse que vous ne la tirerez jamais du fourreau sans en recevoir l’ordre de votre souveraine légitime ; sinon, il ne faut pas l’accepter.

— Sous cette condition, et venant de votre main amie, j’accepte cette épée ; mais pensez-y bien, si nous devons coopérer à quel-

  1. Nom de l’épée du roi Arthur. a. m.
  2. Expression qui manque à noter langue, et que nous hasardons ici. a. m.