Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 14, 1838.djvu/281

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Kennaquhair, confisquée dernièrement au profit de notre noble seigneur le roi, sur l’abbé et sa communauté, pour le haut crime de fidélité à leurs vœux religieux, et sur le point d’être accordée par le haut et puissant traître James comte de Murray à son bon page de dames Roland Græme, pour ses loyaux et fidèles services de sous-espion, de sous-tourne-clef, à la garde de la personne de sa souveraine légitime, la reine Marie.

— Vous vous méprenez cruellement à mon égard ; oui, Catherine, très-cruellement. Dieu sait que je défendrais cette pauvre reine au risque de ma vie ; mais que puis-je faire, que peut-on faire pour elle ?

— On peut faire assez, on peut faire beaucoup ; on pourrait faire tout, si les hommes étaient tous fidèles et braves comme les Écossais du temps de Bruce et de Wallace. Oh ! Roland, à quelle entreprise refusez-vous aujourd’hui votre cœur et votre bras, et cela par pure froideur ou légèreté d’esprit !

— Comment puis-je renoncer à une entreprise qui ne m’a jamais été communiquée ? La reine, ou vous, ou toute autre personne m’a-t-elle ordonné quelque chose pour son service que j’aie refusé ? Ou plutôt ne m’avez-vous pas toutes tenu aussi éloigné de vos conseils que si j’eusse été le traître le plus dangereux depuis le temps de Ganelon.

— Et qui donc aurait été donner sa confiance à l’ami, à l’élève, au compagnon de l’hérétique prédicateur Henderson ? Oui, vous avez choisi un bon précepteur à la place de l’excellent père Ambroise, qui est maintenant chassé de son monastère, s’il ne languit pas même dans une prison pour s’être opposé à la tyrannie de Morton, au frère duquel les biens de cette noble maison de Dieu avaient été donnés par le régent.

— Est-il possible ! s’écria le page ; l’excellent père Ambroise est-il si malheureux ?

— S’il avait appris que vous renonciez à la foi de vos pères, répondit Catherine, c’eût été un coup plus dur pour lui que tous les tourments que la tyrannie peut lui faire endurer.

— Mais pourquoi, » dit Roland très-ému, supposez-vous que… que… que je pense comme vous dites ?

— Le niez-vous, répliqua Catherine ; ne conviendrez-vous pas que vous avez bu le poison que vous auriez du éloigner de vos lèvres ? Nierez-vous qu’il fermente maintenant dans vos veines, s’il n’a pas encore corrompu les sources de la vie ? Nierez-vous que