Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 14, 1838.djvu/290

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notre propre volonté une créature vivante à la captivité que nous devons souffrir nous-même.

— Ah ! madame, reprit le prédicateur, il est sans doute naturel à l’humanité de ne point souffrir sans plaintes la perte de la liberté. Cependant il est des personnes qui ont trouvé dans le temps passé au sein de la captivité temporelle les moyens de se racheter d’un esclavage plus terrible.

— Je sais ce que vous voulez dire, monsieur, mais j’ai entendu votre apôtre, j’ai entendu maître John Knox ; et si j’avais eu à être pervertie, j’aurais volontiers cédé au plus éloquent et au plus savant des hérésiarques ; misérable honneur qu’il aurait pu acquérir en triomphant de ma foi et de mon espoir !

— Madame, ce n’est point aux talents et à l’habileté du laboureur que Dieu accorde une récolte abondante ; les vérités qui vous ont été présentées en vain par celui que vous appelez à juste titre notre apôtre, durant le tumulte et les fêtes de votre cour, peuvent mieux se faire entendre dans ces lieux où il vous est loisible de vous livrer à la réflexion. Dieu sait, madame, que je parle dans l’humilité de mon cœur, comme un homme qui ne se comparerait pas plus aux anges immortels qu’au saint homme que vous venez de nommer. Cependant, si vous vouliez appliquer à un noble et légitime usage ces talents et cette instruction que tout le monde vous reconnaît ; s’il vous plaisait de nous laisser entrevoir le plus léger espoir que vous voulez entendre et méditer les puissants arguments qu’on peut alléguer contre l’aveugle superstition et l’idolâtrie dans lesquelles vous avez été élevée, je suis sûr que le plus éloquent de mes frères, que John Knox lui-même, se hâterait d’accourir ici pour retirer votre âme des erreurs de l’Église romaine qui l’enveloppent comme un filet…

— Je vous suis obligée, ainsi qu’à eux, de tant de charité, interrompit Marie ; mais comme maintenant je n’ai qu’une chambre d’audience, je la verrais avec regret changée en synode huguenot.

— Du moins, madame, ne restez pas opiniâtrement dans l’aveuglement de vos erreurs. Écoutez un homme qui a supporté la faim et la soif, qui a veillé et prié pour se rendre digne d’entreprendre la belle tâche de votre conversion, et qui mourrait avec joie à l’instant où cette conversion si avantageuse pour vous-même, et si utile à l’Écosse, serait enfin accomplie. Oui, madame, si je pouvais ébranler le dernier pilier qui soutient le