Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 15, 1838.djvu/186

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votre bon plaisir, envoyé ici avec son écuyer pour porter un message à Votre Majesté. »

En ce moment l’expression gracieuse qui avait jusqu’alors régné sur la figure d’Élisabeth, fit place à un air de hauteur et de sévérité.

« Milord Sussex, dit-elle, nous a enseigné le cas que nous devons faire de ses messages, par le prix qu’il attache aux nôtres. Ce matin même, à une heure qui n’avait rien d’ordinaire, nous lui avons envoyé le médecin de notre chambre, parce que nous avions appris que Sa Seigneurie était plus dangereusement malade que nous ne l’avions craint d’abord. Il n’est aucune cour d’Europe où il y ait un homme plus savant en son art, plus utile, plus respectable que le docteur Masters, et il se présentait de notre part chez un de nos sujets. Cependant il a trouvé la porte de Say’s-Court défendue par des hommes armés de mousquets, comme si c’eût été sur la frontière d’Écosse et non dans le voisinage de notre cour ; et quand il a demandé en notre nom qu’on le laissât entrer, on le lui a obstinément refusé. Nous ne recevrons, du moins quant à présent, aucune excuse pour le mépris avec lequel on a accueilli cette marque d’excessive condescendance, et nous supposons que le motif du message de lord Sussex était de nous en offrir. »

Ces mots furent dits d’un ton et avec des gestes qui firent trembler ceux des amis de Sussex qui étaient à portée de les entendre. Mais celui à qui ils étaient adressés n’en fut point épouvanté : et aussitôt que la colère de la reine lui parut un peu calmée, il répliqua avec autant de déférence que d’humilité : « Sous le bon plaisir de Votre Majesté, je ne suis chargé d’aucune excuse de la part du comte de Sussex.

— Et de quoi êtes-vous donc chargé, monsieur ? » s’écria la reine avec cette impétuosité qui, au milieu de qualités plus nobles, était un des traits distinctifs de son caractère ; « était-ce de le justifier, ou, mort de mon Dieu ! de me braver ?

— Madame, dit le jeune homme, milord Sussex a reconnu toute la gravité de cette offense, et n’a songé qu’à s’assurer du coupable pour le remettre aux mains de Votre Majesté et l’abandonner à sa merci. Le noble comte, par suite d’une potion que son médecin lui avait administrée, était profondément endormi quand votre gracieux message est arrivé, et Sa Seigneurie n’a appris l’accueil fait à ce royal et consolant message que ce matin après son réveil.

— Et lequel de ses domestiques, au nom du ciel ! a osé repousser