Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 15, 1838.djvu/215

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« J’ai une requête à présenter à Votre noble Seigneurie, — dit ce personnage en le suivant hardimment.

« Et de quoi s’agit-il, brave maître gardien de la ehambre du conseil ?

Clerc de la porte de la chambre du conseil, » dit Robert Lancham avec emphase, et par manière d’erratum.

« Bon ! donne à la fonction le nom que tu voudras, répondit le comte ; mais que désires-tu de moi ?

— Simplement que Votre Seigneurie daigne, comme jusqu’à présent, être mon excellent patron, et me procurer la permission de suivre la cour dans son magnifique et incomparable château de Kenilworth.

— Et pourquoi cela, mon bon monsieur Lancham ? Songez donc que mes hôtes sont déjà bien nombreux.

— Pas assez nombreux, répondit le solliciteur, pour que Votre Seigneurie ne voulût pas accorder un petit coin à son ancien serviteur. Pensez, milord, combien ma verge est nécessaire pour écarter tous ces curieux qui obséderaient l’honorable conseil, et assiégeraient les trous de la serrure et les fentes de la porte. Ma baguette sera aussi utile qu’un chasse-mouche dans la boutique d’un boucher.

— Il me semble que vous avez choisi une comparaison qui n’est guère flatteuse pour l’honorable conseil, mais ne cherchez pas à la justifier. Venez à Kenilworth, si vous voulez ; il y aura bien d’autres sots ; et de cette faqon, tu te trouveras en bonne compagnie.

— Eh bien ! s’il y a des sots, « répondit Lancham avec un air de vive satisfaction, « je vous assure que je m’amuserai avec eux ; car il n’y a pas de lévrier qui ait autant de plaisir à poursuivre un lièvre que j’en ai à donner la chasse à un sot. Mais j’ai une autre faveur insigne à demander à Votre Honneur.

— Parle, et laisse-moi aller ; la reine va sortir à l’instant.

— Milord, je désirerais emmener avec moi un camarade de lit.

— Comment, impudent coquin !

— Mais, milord, en tout bien tout honneur. J’ai une femme aussi curieuse que sa grand’mère qui mangea la pomme : or je ne puis l’emmener avec moi, les ordres de Sa Majesté étant si sévères contre les officiers qui se font accompagner de leurs femmes dans les voyages, et qui encombrent ainsi la cour de cotillons. Mais ce que je demandeiais à Votre Seigneurie, ce serait de lui donner un rôle dans quelque mascarade et quelque divertissement où elle paraîtrait