Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 15, 1838.djvu/250

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— Fort bien, comme tu peux le voir, répondit Michel ; je te verserai une rasade pour l’étrenne. Remplis le flacon, maître sommelier.

— Si la gageure était à recommencer, je crois bien, mon cher Michel, que tu ne me gagnerais plus de toile de Hollande, dit le mercier ; car ce mauvais sujet de Foster ne fait que déblatérer contre toi, et jure que tu ne toucheras plus le seuil de sa porte, parce que tu pousses des jurons à faire écrouler la demeure d’un bon chrétien.

— Dit-il cela, ce misérable, ce vil hypocrite ? s’écria Lambourne ; eh bien, je veux qu’il vienne recevoir ici mes ordres, ce soir même, sous le toit de mon oncle, et je lui chanterai une telle antienne, que pendant un mois il croira avoir le diable à ses trousses, pour le seul fait de m’avoir entendu…

— Décidément le vin est le plus fort, dit le mercier. Quoi ! Tony Foster obéir à ton coup de sifflet ! ah, mon bon Michel ! va te coucher, va te coucher, te dis-je.

— A-t-on vu un pareil oison ? » s’écria Michel enflammé de colère. « Je te parie cinquante anges d’or contre la garniture des cinq premières tablettes de ta boutique, à partir d’en haut du côté opposé à la fenêtre, que je fais venir Tony Foster dans cette auberge avant que nous ayons bu trois fois à la ronde.

— Je ne veux point risquer un tel pari, » dit le mercier, quelque peu dégrisé par une offre qui annonçait de la part de Lambourne une connaissance trop exacte des secrets de sa boutique ; « je ne veux point d’une pareille gageure ; mais je parierai, si tu veux, cinq anges d’or de ma poche contre cinq de la tienne, que Tony Foster ne quittera pas sa demeure, et ne viendra pas dans un cabaret après la prière du soir, pour toi ni pour toute autre personne.

— Accepté, dit Lambourne. Venez, mon oncle, prenez les enjeux, et ordonnez à un de vos jeunes saigne-tonneaux, à un de vos apprentis sommeliers, de courir sur-le-champ à Cumnor-Place, et de remettre cette lettre à Foster, en lui disant que son ami Michel Lambourne désire lui parler ici, dans le manoir de son oncle, d’une affaire de la plus grande importance. En route, mon garçon, car le soleil est bas, et le misérable se couche avec les poules afin d’épargner la chandelle. En route. »

Après un court intervalle, qui fut rempli par des rasades et des bouffonneries, le messager revint annonçant que M. Foster allait venir à l’instant.